Interview de Typhanie
Interview de Typhanie
Interview de Typhanie par Jean Philippe KRAUSENER
Jean-Claude Amiard, figure emblématique de notre club, le Cavalier de l'Espérance, a pris sa retraite fin juin 2017.
Nous avons fait appel pour le remplacer à Typhanie Binétruy pour assurer les cours débutants enfants et adultes.
Nos adhérents ont un très bon ressenti. Nous avons également décidé de développer le blog du club. Et pour commencer ces articles qui traiteront du monde des échecs, nous vous proposons tout naturellement une interview de notre nouvelle enseignante, Typhanie.
Le Cavalier : Bonjour Typhanie tu arrives au Cavalier de l’Espérance comme professeur d’échecs auprès de nos jeunes et adultes débutants. Peux-tu te présenter ?
Typhanie : Je m’appelle Typhanie Binétruy j’ai 30 ans, j’ai passé mon diplôme d’animatrice de la fédération française des échecs en été. Je l’ai obtenu au mois d’août.
J’ai appris à jouer aux échecs en 2010. Il y a à la fois assez longtemps et pas si longtemps que çà.
Le Cavalier : C’est vrai, c’est récent 2010
Typhanie : Oui c’est récent 2010, parce que j’avais appris très rapidement le mouvement des pièces quand j’étais petite et
Une copine à moi a passé le DAF, elle m’a donné quelques cours. Ça m’a tout de suite énormément plu. J’ai commencé à jouer directement en compétition et environ un an après avoir commencé à jouer aux échecs, j’ai commencé à donner des cours pour très jeunes enfants. Parce que j’avais vraiment beaucoup accroché. Et donc j’ai commencé à enseigner les échecs en 2011. Une chose en appelant une autre, j’ai décidé d’en faire ma profession à partir de cette année et c’est à l’heure actuelle mon activité principale.
Le Cavalier : Donc au bout d’un an après avoir appris les échecs, tu t’es mise à les enseigner.
Typhanie : Oui, je faisais de l’initiation pour les très jeunes enfants, j’avais un tout petit niveau, mais je connaissais les bases. Je faisais de l’initiation pour les très jeunes enfants et ça reste à l’heure actuelle mon expérience professionnelle la plus agréable. J’ai adoré çà et à la fois le fait d’être en milieu scolaire et d’être dans l’éducatif et d’un autre coté ne pas avoir les contraintes d’un programme à respecter ou d’un niveau à faire avoir aux élèves, vraiment être dans le ludique
Le Cavalier : C’est Jean-Claude qui t’a recommandée pour le remplacer. Est-ce que tu peux nous parler de lui ? Jean-Claude qui avait 30 ans d’ancienneté dans le club
Typhanie : Alors en fait il y a quelque chose de très drôle à vous raconter avec Jean-Claude, c’est qu’en fait, j’ai enseigné dans mon club d’échecs à Chelles entre 2011 et 2013. Et quand je suis partie de mon club en 2013, c’est Jean-Claude qui m’a remplacé dans mon club d’échecs de Chelles. Il a pris la suite le samedi après-midi auprès des élèves de mon ancien club. C’est drôle parce que je l’ai revu au club de Créteil quand je faisais mon stage. Je l’ai reconnu, on a discuté et c’était drôle parce qu’au club de Créteil, Jean-Claude et moi on parlait davantage de pâtisserie et de cuisine que d’échecs. J’étais contente de le revoir, et ce qui m’a marqué c’est que c’est quelqu’un qui a une énergie assez incroyable et qui vit visiblement après avoir passé 30 ans à faire des échecs, être présent dans le milieu des échecs et en tant que président de club il avait toujours le même enthousiasme et le même plaisir à enseigner les bases du mouvement du pion à des enfants de 5 ans alors même que c’est un joueur d’un niveau bien plus élevé que je ne le suis. C’était vraiment impressionnant de voir çà, d’autant plus que maintenant qu’il est parti à la retraite quand je lui ai demandé s’il allait arrêter d’enseigner les échecs, il m’a répondu que non. Il partait à la retraite à la campagne, mais qu’il continuait à enseigner les échecs. Il a créé un club. C’est quelqu’un qui ne se lasse visiblement jamais de cela. Et ça fait plaisir de voir des gens dans le métier qui ont toujours le même enthousiasme pour ça.
« J’espère que ce sera mon cas »
et que je ne me lasserai pas non plus ; C’est surtout ce qui ressort de sa personnalité ; un enthousiasme, une énergie assez incroyable.
Le Cavalier : Tu le remplaces ici, au Cavalier de l’Espérance, comment te sens-tu ici chez nous ? Comment s’est passée ton arrivée.
Typhanie : Heureusement j’ai été très bien accueillie, c’était vraiment sympa. Forcément j’étais un petit peu stressée, je prends la suite de Jean-Claude qui était là depuis des années. Il n’est plus à rajouter que c’est un entraîneur chevronné, quelqu’un qui a mené des jeunes aussi bien que des adultes à un niveau très élevé et qui a été président de club pendant très longtemps. Donc c’était compliqué de prendre la suite. Mais d’un autre côté, j’étais très bien accueillie, moi je m’y sens vraiment à l’aise. Et puis il faut dire que le cadre du club est vraiment agréable, être dans un petit parc, être dans des bâtiments qui sont agréables et dans lesquels on se sent à son aise. Après c’est toujours difficile de prendre la suite de quelqu’un qui est resté là, pendant très longtemps. J’espère pouvoir être digne de sa mémoire, si on peut dire cela. Et au moins, poursuivre le travail qu’il a entamé auprès des jeunes et puis former des adultes au jeu d’échecs également.
Le Cavalier : Dans le jeu d’échecs, il y a certainement des choses que tu aimes et que tu n’aimes pas.
Typhanie : C’est une très bonne question. Alors moi ce que j’aime dans le jeu d’échecs, c’est que c’est un jeu qui m’a permis de me concentrer énormément. Ça n’a pas forcément l’air comme ça parce que je pense être quelqu’un de plutôt calme, mais j’ai énormément mal à me concentrer. Ça toujours était très difficile pour moi de me concentrer. Et au niveau des performances scolaires des fois çà peser un petit peu et quand j’ai commencé les échecs j’étais donc étudiante et le fait de devoir me concentrer sur des parties d’échecs qui étaient longues pendant plusieurs heures d’affilée, ça m’a énormément aidé. Et à l’heure actuelle ça reste, je pense, ce que j’aime le plus dans les échecs c’est cette capacité à vous prendre l’esprit et à vous projeter sur une seule et unique tâche, et sur quelque chose qui vous permet de vous abstraire de tout ce qu’il y a à l’extérieur. Quand vous voyez une position aux échecs vous devez vous donner entièrement à la position, parce que sinon vous n’allez pas voir ce qu’il y a voir dessus. Et donc çà c’est vraiment ce que j’aime le plus dans les échecs.
Le Cavalier : Ce que tu n’aimes pas ?
Typhanie : Ce que j’aime le moins, il y a deux choses. La première chose c’est l’aspect compétition, dans le sens ou j’ai beaucoup de mal à gérer le stress de la compétition c’est difficile, pour moi très difficile. J’aime çà parce que ça me permet de me concentrer, mais pour moi c’est difficile. C’est difficile de perdre une partie
Le Cavalier : C’est la gestion du temps avec la pendule ?
Typhanie : Oui, oui, j’ai un gros problème de gestion de temps avec la pendule, j’ai encore fait la démonstration dimanche dernier c’est juste dramatique, quand il me reste une minute à la pendule et qu’on est au 25ème coup alors qu’on a un rajout de temps uniquement au 40ème coup, c’est vraiment dramatique. Voilà, puis
« le stress des compétitions c’est difficile. »
C’est quelque chose de personnel, j’ai une 2ème chose que j’’aime moins dans le milieu des échecs c’est parfois le manque comment dire l’austérité dont ce jeu peut faire preuve à l’égard des gens qui ne sont pas forcément initiés. C’est-à-dire que si vous arrivez dans un club, dans certains clubs d’échecs, dans certains milieux échiquéens, dans certains tournois d’échecs c’est parfois difficile de s’intégrer. C’est parfois difficile, comment dire de s’intégrer au sein d’un monde assez petit ou beaucoup de gens se connaissent et je pense on aurait encore un travail à faire là dessus. Je pense que beaucoup de gens font ce travail-là.
Le Cavalier : Tu trouves que les gens sont trop hautains ?
Typhanie : Non, hautain, ce n’est pas le mot, mais par contre c’est vrai qu’il y a des clubs dont lesquels c’est difficile de jouer contre des gens qui sont plus forts que vous parce qu’ils n’ont pas forcément envie de jouer avec vous parce que vous êtes d’un plus bas niveau. Il y a des clubs dans lesquels les joueurs ne viennent que pour jouer des compétitions et ne font pas vraiment vivre les clubs. Je trouve cela dommage. Alors après il y a des clubs qui résistent à cette tendance-là. Pour lesquels il y a du monde les vendredis soirs, mais y a aussi des clubs pour lesquels ce n’est pas le cas. Pareil dans certains tournois, il se passe très bien, et y a dans certains tournois, ce n’est pas toujours pareil, mais y a une minorité de gens qui se comportent soit de manière impolie, soit de façon qui n’est pas appropriée. Je pense qu’on a encore un travail à faire là dessus, car je sais que dans d’autres sports, si des incidents de ce type survenaient, par exemple quelqu’un qui se lève et qui insulte son adversaire pour une raison X où Y et bien cette personne-là serait sanctionnée. Il y a un petit travail à faire là dessus. Je ne suis pas en train d’émettre une critique négative de toute l’institution du jeu d’échecs de toute la fédération, mais c’est vrai que je pense qu’on a à faire un petit, effort la dessus.
Le Cavalier : Est-ce que tu as des joueurs d’échecs préférés, une joueuse préférée, est-ce que tu as tes propres stars dans le milieu des échecs. ?
Typhanie : Alors moi je ne suis pas dans le culte de la personnalité. Il se trouve que je suis très admirative de certaines parties d’échecs que j’ai du mal à comprendre. Il y a un joueur français que j’aime beaucoup qui vient de passer grand maître international et dont les parties m’impressionnent toujours énormément c’est Bilel Bellahcene de Tremblay-en-France je crois, il a gagné le championnat de Paris cette année et il fait vraiment des parties, on a l’impression qu’il laisse son adversaire, prendre l’avantage alors que positionnellement ; Moi que je vois des joueurs qui font des débuts comme çà, je me dis il n’a pas compris le principe du centre et en fin de compte c’est tellement bien calculé que quelque coups plus tard il prend l’avantage. Je suis très admirative de ça, je suis totalement fan de Judith Polgar. Le fait que les 3 sœurs Polgar aient fait à elles seules l’équipe de Hongrie pendant des années, je trouve ça extrêmement impressionnant parce qu’
« il y a encore très peu de femmes à très haut niveau. »
Le Cavalier : Et dans les histoires des échecs, tu n’as pas un joueur préféré ?
Typhanie : Alors Capablanca, mes cours se basent sur le livre de Capablanca, c’est la base en quelque sorte, c’est à dire, c’est du jeu positionnel, c’est pourquoi les cavaliers fous sont meilleurs que les cavaliers, point à la ligne. D’une manière générale parce que çà, çà et çà, pourquoi est-ce qu’il faut aller en finale pour gagner et pourquoi est ce que c’est important de finir en finale pour gagner. Bah parce c’est la meilleure façon de faire pour gagner et voilà le jeu plus calme, plus positionnel de Capablanca. Un autre que Maître du jeu positionnel que j’aime beaucoup, Karpov, très très très impressionnant d’avoir réussi à tenir contre Gary Kasparov, on croit tout le temps que Gary Kasparov c’est le grand vainqueur du duel Kasparov/Karpov alors qu’en fait ça s’est joué à une seule partie Karpov déploie des trésors d’ingéniosité pour sauver des positions, c’est proprement impressionnant.
Le Cavalier : Les femmes dans les échecs, qu’est ce que tu en penses ? C’est difficile ? Les échecs c’est un jeu de macho ?
Typhanie : Loin de moi l’envie d’aller dans les clichés. Est-ce que c’est facile ou est-ce c’est difficile pour une femme d’arrivée dans le milieu des échecs ? En fait y a les 2, on pourrait se dire que c’est super difficile parce qu’il y a des mecs, en fait c’est presque l’inverse c’est facile de rentrer dans la mesure où quand vous arrivez, vous êtes une fille. Y en a pas beaucoup, tout le monde veut vous faire jouer. Pour l’anecdote quand je suis arrivée, j’ai poussé la porte d’un club d’échecs on m’a expliqué qu’est-ce que c’était le roque parce que je ne savais pas. On m’expliqué ce que c’était de sortir des cavaliers pour contrôler le centre. Par ce que je savais et puis 3 semaines plus tard je suis allée jouer en nationale 2 parce qu’il n’y avait pas de féminine. Évidemment autant vous dire que cette partie-là je l’ai gardé, elle était mémorable j’ai eu la chance de démarrer en compétition dès le début parce que j’étais une fille et donc quelque part ça m’a aidé. Après c’est difficile, c’est-à-dire que moi, je n’ai jamais été timide je me suis toujours fait des copains, maintenant faut vous mettre à la place d’une fille qui ne connaît personne et qui va en tournoi d’échecs, elle va passer une journée entière parce que des fois les tournois, ça dure longtemps, vous allez passer une journée entourée de tout un tas d’hommes alors voilà j’ai 99,99 % des personnes qui sont là et qui sont charmantes et polies et tout à fait convenables, mais vous pouvez toujours tomber sur la personne qui va vous faire une réflexion sexiste ou alors la personne, le mec qui va draguer lourdement alors que ce n’est pas le moment, ce genre de choses là. C’est un milieu d’hommes c’est donc un milieu difficile quand on ne connaît pas c’est toujours un peu intimidant malheureusement ; alors après moi j’ai eu droit à certaines réflexions sur mes parties que j’ai pas spécialement appréciées....C’est difficile aussi quand on entend certaines de théories, des théories explicatives selon que les femmes sont moins nombreuses aux échecs ou, alors le fait que les femmes ne réfléchissent pas comme les hommes parce elles n’ont pas un cerveau qui est le même. J’ai lu sur un site internet l’autre jour qui un blog consacré au développement des échecs féminins quelqu’un qui mettait en commentaire, qu’il ne fallait pas s’étonner qu’il y ait moins de femmes que d’hommes aux échecs puisque les femmes avaient un cerveau d’une masse proportionnellement inférieure de 14 % ce qui est dû au fait que globalement les femmes sont plus petites d’une part qu’elles ont une tête plus petite et aussi cela n’a rien à voir. Quand on connaît le fonctionnement du cerveau cela n’a rien à voir donc les explications physiques sur l’infériorité des femmes existent encore et quand vous arrivez aux échecs et qu’on vous explique ce genre de choses çà veut juste dire que vous n’avez rien à faire ici, que vous êtes intellectuellement inférieure et si je devais avoir une seule bonne raison dans le milieu des échecs ça devrait être celle-ci c’est juste pour prouver que ce n’est pas le cas et la 2ème raison juste pour terminer là-dessus sur l’explication de la non-présence des femmes aux échecs qui m’énerve énormément et l’explication de type psychanalytique de type les femmes sont pas combatives ou alors les femmes n’ont pas besoin de tuer le père,
« le roi c’est le père »
donc c’est pour cela qu’elles ne s’intéressent pas aux échecs. Ca donne quelle image des femmes qui sont actuellement dans le milieu des échecs et qui sont bonnes aux échecs, ça veut dire quoi qu’elles ont un problème freudien quelconque, ça veut dire qu’elles ne sont pas à leur place chaque fois qu’on essaie d’expliquer le pourquoi de l’absence des femmes aux échecs. On donne une explication qui est autre que culturelle, sociale, éducative, etc., en fin de compte on en revient à dire les femmes n’ont pas leur place dans les échecs, on en revient à justifier cette absence-là c’est çà pour le principal problème, la principale difficulté d’être une femme dans le monde des échecs
Le Cavalier : Quel est le niveau des femmes aux échecs ? Est-ce qu’il y a des grands maîtres
Typhanie : Oui il y des grands maîtres féminines évidemment, après c’est un sujet qui est tellement vaste pour une interview. Evidemment à un très haut niveau il y a beaucoup moins de femmes que d’hommes, il doit y avoir à peu près une femme pour 50 ou 60 d’hommes. A un plus petit niveau ça se vérifie moins, mais ce qui intéressant de voir aussi c’est qu’on a tendance à développer les compétitions féminines c’est-à-dire un championnat de France des petites poussines et y a pas assez de mixité et donc pour moi un des problèmes aux échecs c’est aussi un problème de séparation des sexes dans des tournois différents des tournois séparés qui à mon avis n’ont pas lieu d’être pour en revenir à moi qui ait l’expérience depuis quelques années des échecs en milieu scolaire basique là ou on a autant de garçons que de fille, car dans les classes c’est égal y a pas de différence de niveau. Dans un cycle de 10 à 15 séances d’échecs les filles ont globalement le même niveau que les garçons. Sachant qu’il faut prendre en compte le fait que beaucoup de garçons ont déjà appris les échecs avant de venir à l’école ce qui est moins le cas des filles les parents apprennent plus facilement les échecs aux garçons qu’aux filles
Le Cavalier : Est que tu as une citation préférée ou une maxime, un proverbe ?
Typhanie : Oui celle que j’ai donnée au début du cours toute à l’heure peut être celle de Tartakover qui rejoint cette idée-là du tactique et du positionnel « la tactique dans une partie d’échecs c’est ce qu’il y a à faire quand y a quelque chose à faire, le positionnel savoir ce qu’il y a à faire quand il n’y a rien à faire » l’idée c’est qu’il ne peut pas y avoir de position tactique qui interviennent sans une bonne position sur l’échiquier avant qui permettent l’existence de ces schémas tactiques
Le Cavalier : Ça, c’est Tartakover qui a dit çà
Typhanie : Alors Tartakover il n’a pas dit la suite, il a juste dit « la tactique c’est ce qu’il y a à faire quand il y a quelque chose à faire et le positionnel c’est ce qu’il y faire quand il n’y a rien à faire ».
Le Cavalier : Bien nous avons parlé des échecs sur lesquels tu es venue assez tard, tu as sans doute d’autres passions, d’autres loisirs ?
Typhanie : je fais beaucoup de sport, c’est important même pour les échecs, garder un bon niveau aux échecs il faut être physiquement en forme et je lis énormément. J’ai une formation philosophique je lis beaucoup de philosophie et je lis aussi beaucoup de littérature aussi bien de la littérature classique que du fantastique. Le sport, la philosophie, la lecture
Le Cavalier : Quel type de sport à part les échecs ?
Typhanie : Je fais de la musculation et du cardio assez intense
Le Cavalier : Et quels sont tes qualités, tes défauts ?
Typhanie : C’est toujours la question un peu entretien d’embauche. Je vais éviter la langue de bois parce qu’on n’est pas là pour çà. Je pense que
« ma qualité est d’être quelqu’un de patient »
et qui prend du recul vis a vis des choses et ça je pense que c’est important parce que si on n’a pas la patience de comprendre qu’un enfant il est juste pas prêt à atteindre tel niveau et si on n’a pas la patience de répéter parce que ça fait 20 fois qu’on explique que le pion il ne mange pas en arrière. Ben si on n’a pas la patience de le rerépéter encore une fois, ben ça ne sert juste à rien de faire ce genre d’activité. Il faut accepter, je dis pour les enfants par c’est surtout vrai pour les enfants. Il faut accepter des fois que les enfants y a des jours ils soient pas en forme pour faire cours. Le cours se passe pas très bien parce qu’ils n’arrivent pas à se concentrer, ils ont mal dormi, ils sont enrhumés. Voilà il faut juste prendre çà avec philosophie si j’ose dire. Il faut comprendre que des fois cela demande de la répétition des fois ça se passe bien des fois ça se passe moins bien. Si on prend le recul et si on est patient, tout se passe mieux. Voilà si j’avais une qualité qui me serve dans ce cas ce serait celle-ci. Maintenant les défauts, au niveau des défauts, le pire, celui qui me desserre le plus c’est que je suis extrêmement orgueilleuse et même si je fais tout ce qu’il faut pour me remettre en question. C’est parfois difficile de pas typiquement défendre son coup quand on analyse une partie aux échecs c’est mon gros défaut, quand j’analyse une partie aux échecs avec quelqu’un de beaucoup plus fort que moi y compris comme avec l’ordinateur j’ai tendance à défendre mon coup coûte que coûte pour expliquer pourquoi il est bon y compris même si on me démontre par A+B qu’il est mauvais. En général quand je perds une pièce à l’issue de la combinaison j’abandonne le morceau, mais j’ai tendance à maintenir ce que j’ai décidé et à essayer de défendre mes positions plutôt qu’à reconnaître que j’ai tort c’est un défaut très ennuyeux.
Le Cavalier : Tu n’aimes pas perdre ?
Typhanie : Je ne connais pas beaucoup de gens qui aiment perdre. Je déteste perdre évidemment, la partie nulle c’est une autre question. Est ce que j’aime faire nulle ou pas faire nulle ? Globalement je n’aime pas parce que c’est toujours décevant, mais c’est toujours mieux de faire nulle que perdre. La nulle est quand même souvent décevante.
Le Cavalier : Pour toi une partie d’échecs c’est une guerre, une bataille ?
Typhanie : Pour moi une partie d’échecs c’est un débat, c’est un débat entre les idées des blancs et les idées des noirs c’est un débat entre ce que les blancs pensent être une bonne position et comment est- ce qu’ils argumentent pour défendre le fait que ce coup est un bon coup et qu’il faut jouer tel plan et le fait que les noirs pensent au contraire que ce coup est meilleur quand il faut jouer tel plan. Et donc pour moi ce serait plus de l’ordre du débat argumentatif. Pour moi c’est ça le sens du plan aux échecs, un plan c’est une façon d’argumenter sur une position, je pense que le sens de la position, c’est d’attaquer vers tel endroit, que les faiblesses se situent ici et tu peux gagner en utilisant tel levier et tel levier et je pense que ce serait plutôt un débat.
Le Cavalier : On a compris que c’était ta 1ère année parmi nous, que tu t’y sentais bien. Est-ce que tu t’es fixée des objectifs ? Tu as un but dans cette saison ? Par rapport aux enfants ?
Typhanie : Ce n’est pas moi qui forme les jeunes pour la compétition pour le moment. Maintenant mon objectif serait déjà de réussir un faire un tournoi de fin d’année avec tous mes élèves. J’ai plusieurs groupes de débutants, un le samedi matin et un le mercredi après midi. Pour le mercredi après-midi j’ai vraiment de très très jeunes enfants entre 4 ans et 6 ans pour le 1er groupe et mon objectif avec eux si je peux parler ainsi c’est qu’à la fin de l’année ils réussissent à faire une partie en entier ça paraît un objectif très petit pour une année entière. Il faut savoir qu’un enfant quand il a 4 ans ou 5 ans c’est difficile pour lui de rester concentré longtemps donc je pense que serait un objectif viable qu’à la fin de l’année ils arrivent à faire une partie du début à la fin ou éventuellement qu’il y en ait un qui mette échec et mat son adversaire. Pour ce groupe-là c’est mon objectif alors après on a le droit d’aller au-delà, on a le droit d’aller en dessous et en ce qui concerne les objectifs je suis un petit peu adepte de ce que l'on appelle les méthodes Montessori en terme éducatif. C’est à dire le fait que chaque objectif doit être fixé avec l’enfant et en concertation avec l’apprenant et avec l’éducateur. Je pense que chaque enfant doit avoir un objectif différent il y a des enfants je pense que leur objectif est de se concentrer entièrement sur une partie entière et ne pas faire de faute d’étourderie je pense qu’il y pour d’autres enfants il y a comme objectif ça peut être de vaincre sa timidité. Et jouer des coups qui sont plus ambitieux et/ou je pense qu’avec le temps en apprenant à connaître les enfants, en apprenant à voir qui participe ou qui participe moins on peut réussir à mettre en place des objectifs. J’ai pas d’objectif pour moi à titre personnel en tant que professeur si ce n’est que de faire un tournoi avant la fin de l’année d’où une sorte d’achèvement plutôt que d’objectif. Par contre je pense qu’effectivement
« il faut que chaque enfant réussisse à se fixer
des objectifs à lui »
et réussisse à mettre le doigt sur ses faiblesses et sur ses forces. Qu’il réussisse à faire le tri dans tout cela.
Le Cavalier : C’est vrai qu’on a des enfants de tous les âges, des handicapés aussi comme ma fille par exemple c’est aussi les emmener vers le haut
Typhanie : C’est toujours l’objectif d’aller vers le haut sachant que, mener vers le haut d’accord, mais je pense les échecs ça doit rester quelque chose qui n’est pas douloureux pour l’enfant C’est-à-dire qu’on n’est pas ici dans une matière scolaire, extrêmement scolaire dans laquelle il faudrait qu’à la fin de l’année on ai un socle commun au-dessus duquel tous les élèves soient. ça ne peut pas fonctionner comme çà, les élèves quand ils viennent le mercredi après midi ou le samedi matin ils sont sur leur temps de loisir ils sont sur le temps où il doit être agréable pour eux de jouer. Pour certains quelque chose d’agréable ça va être une partie, de faire de la compétition, ça va être d’être vraiment dans le combatif et pour d’autres élèves ça va être juste de faire une partie comme ça parce qu’ils sont heureux quand ils jouent. Et je pense que notamment que, Laura, ta fille dont tu viens de parler, ben visiblement elle est heureuse quand elle fait juste une partie, elle, son plaisir est visible. Globalement ce qu’elle aime dans les échecs c’est jouer, une partie contre quelqu’un et de voir des coups, etc.... Et donc évidemment il faut mener les enfants vers le haut dans le sens on va pas les inciter à être comment dire, on ne va pas leur apprendre à jouer moins bien, mais après il faut s’attendre à terme à ce que tous les enfants fassent tous de la compétition ou alors soient tous des férus d’échecs le restant de leur vie. La question c’est qu’est ce qu’on peut leur apporter sur un temps de loisir sur un week-end et comment est-ce qu’on dispatche les enfants. Ceux qui demandent à faire de la compétition et ceux qui veulent aller plus loin et ceux qui simplement là pour du loisir c’est aussi possible pour des adultes, y a des adultes qui veulent de la compétition,…
Le Cavalier : Justement même question pour le cours adulte
Typhanie : Vous serez de toute évidence tous 1800 à la fin de la saison, non je plaisante mon objectif est plus un objectif de progression, j’ai envie de faire un livre en entier, les fondamentaux de Capablanca j’aimerai qu’on progresse tout au long de l’année sur ce livre-là et j’aimerai que les notions soient assez bien comprises et après mon objectif si je dois être un peu plus concrète, ce serait de donner à mes élèves une base suffisamment solide en finale pour qu’il n’y a plus aucun élève qui se retrouve dans une position ou il a du matériel en plus ne serait-ce que 2 pions en plus et qu’il n’arrive pas à concrétiser cela. Après il y a du travail à faire évidemment en milieu de jeu après y a du travail à faire sur les ouvertures même si c’est une question différente, mais l’objectif c’est çà. L’objectif est qu’on arrive à échanger toutes les pièces et qu’on arrive à la fin d’une partie, on ne se dise pas on sait pas comment faire parce qu’on fin de compte on arrête d’abandonner les parties trop tôt et si on arrête de signer des nulles trop tôt on se rend compte que l’achèvement naturel d’une partie d’échecs s’est d’aller vers la finale et il faut être capable de faire quelque chose dans ces finales-là ; on va dire que si j’avais un petit objectif en terme de niveau ou autre se serait d’arrêter de perdre des finales gagnantes parce que par expérience c’est vraiment quelque chose d’extrêmement triste tu te bats pendant toute ta partie, tu réussis ton ouverture, tu réussis ton milieu de jeu, tu réussis à gagner un petit avantage matériel, tu arrives en finale et là tu perds ou tu fais nulle et ça se qu’il y a de plus frustrant aux échecs et donc j’ai envie que çà n’arrive à aucun de mes élèves.
Le Cavalier : Bien on arrive au terme de cette interview, Charly félicite Typhanie pour son travail sur les enfants, sur son approche de son apprentissage
L’interview a été réalisée mi-octobre par Jean-Philippe Krausener, Trésorier et Community Manager et la présence de Charly Launay, notre Président. Nous remercions Typhanie pour le temps accordé à cette entrevue.
dimanche 5 novembre 2017